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Cette réflexion a pour but de faire ressortir tout le cheminement qui a lieu lorsqu'une personne malade est sur le point de mourir. Au tout début, la personne malade expérimente la maladie dans son corps. En effet, lorsque la personne atteinte est mourante, à travers les implications de la maladie, les traitements suivis, les effets secondaires en découlant, elle développe une conscience intérieure, intuitive, de ce qui se passe. Cette conscience qu'a la personne très malade d'elle-même précède (souvent) même les confirmations médicales. Ainsi, la personne mourante ressent au plus profond d'elle-même ce qui se passe.
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Puisque cette réflexion s'inscrit dans une perspective d'attachement, c'est à la formation de ce lien que je me réfère et sur celui-ci que je me base. La relation d'attachement a comme principale fonction de favoriser une proximité physique et émotive entre un enfant et ses parents d'une part, ou entre une personne en état de vulnérabilité ou de dépendance et ses proches, d'autre part. Cette proximité a comme objectif habituel de protéger d'un danger. Cette protection remplit le but ultime de la relation d'attachement qui est, enfin, de procurer une sécurité ressentie face au danger dont la personne est menacée.
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Cependant, dans le cas qui nous concerne, lorsqu'une personne malade est en perte totale d'autonomie, les proches ne peuvent protéger l'être cher (la personne malade) du danger qui est la mort. Ils sont impuissants devant celle-ci. Alors, la relation d'attachement est menacée dans la source même de son existence, qui est de sécuriser l'être en état de vulnérabilité et de dépendance en le protégeant d'un danger imminent à travers une proximité physique et affective créée, puisque la proximité physique, favorisant celle émotive, ne sera bientôt plus possible. Un sentiment de culpabilité naît (fréquemment) de cette impuissance à sauver la personne malade et à la protéger devant ce danger qu'est la mort. Les proches, ne pouvant la protéger physiquement, tentent souvent de la protéger au moins affectivement, en se retenant de lui exprimer et même de lui manifester leur chagrin, leur colère, leur peine, leur espoir, leur soulagement même de la voir mourir... Pourtant, la personne mourante le ressent. Elle comprend alors qu'il n'est pas permis de s'exprimer, et se retient dès lors de s'ouvrir elle-même.
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Cependant, une distance grandissante s'installe alors entre la personne malade qui est mourante et ses proches, chacun espérant, par la rétention émotive, protéger celui qu'il aime. Mais éprouvant ainsi un sentiment de solitude d’autant plus grand. Chacun se sent alors plus seul et ressent le poids de la solitude…
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Ce poids engendre un sentiment dépressif, lui-même relié au sentiment de perte ressentie, que celle-ci soit physique ou affective. Comme si, en quelque sorte, ils se perdaient déjà mutuellement, avant même que la mort ne soit imminente.
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Et cela-même est insécurisant. L'on découvre alors que cette attitude de rétention émotive va à l'encontre même du but poursuivi par celle-ci, qui est de procurer une sécurité ressentie. Car ce sentiment de sécurité provient de la proximité affective développée entre des personnes qui sont mutuellement attachées l'une à l'autre, par le fait qu'elles ne se sentent plus seules mais accompagnées. Le vécu, comme la relation, est alors partagé et chacun peut se soutenir, tant affectivement que physiquement.
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D’où l’importance de s’ouvrir pour s’accueillir mutuellement dans ce que l’on est. Car c'est à travers l'ouverture que l'on peut se faire proche. En étant vrai, tout simplement. Sans masque, sans faux fuyant. La personne malade mourante s'ouvre et se révèle à différents niveaux, parfois à travers le langage symbolique qu'elle utilise. Il importe d'y être attentif, afin de recevoir ce qu'elle nous partage et nous dit d'elle, de ce qu'elle comprend, de ce qu'elle ressent. Ceci est pour elle un moyen de se rapprocher de ceux qu'elle aime, de leur parler, souvent à mots couverts. Les proches peuvent répondre à l'être cher en s'ouvrant eux-mêmes, soit à travers cette forme de langage, ou en lui exprimant leur état intérieur, même en silence... En s'ouvrant eux-mêmes, il permettent alors à la personne atteinte de faire de même. C'est ainsi que, dans la relation, plutôt qu'il y ait les barrières de la rétention, il coule alors une liberté d'expression. Une ouverture à la communication.
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Ainsi, l'ouverture permet un rapprochement affectif amenuisant la distance émotive, et, par le fait même, sécurise la personne mourante face à l'inconnu auquel elle fait face. De plus, alors que cette proximité physique ne sera plus possible à cause du détachement physique à venir, combien plus (! ) il importe de favoriser la proximité affective entre la personne en fin de vie et ses proches. Alors que leur présence physique sera désormais impossible, il importe de manifester à l'être aimé qu'ils demeureront toujours près de lui affectivement, qu'ils ne l'abandonneront pas, qu'ils le garderont toujours présent en eux. La personne malade ressent alors que, peu importe le détachement physique, l'attachement affectif, lui, demeurera toujours. La présence des personnes qui sont les plus significatives pour elle, ses proches, est intériorisée. Il en est ainsi pour les proches. Ils portent en eux la présence intériorisée de cet être cher comme un trésor précieux. Un trésor qui ne se tarit pas. Il demeure, tant qu'existera l'amour. Cette proximité affective devient possible à travers le partage entre des êtres qui se sont aimés, qui s'aiment, et qui s’aimeront toujours…
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Et tout ce qui fut partagé demeurera présent dans le coeur de ceux et celles qui se sont aimés. C'est ce qui reste après. L'amour qu'on a en soi, on l'emporte avec soi.
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C'est ainsi que la présence intériorisée de l'être aimé devient un soutien. Elle nous garde proches à jamais... C'est alors que cette expérience éprouvante peut devenir une expérience de croissance, transformant pour toujours la personne qui l'a vécue et traversée dans le partage et l'amour. Elle devient alors porteuse d'une richesse jusqu'alors insoupçonnée. D'une richesse intérieure, invisible pour les yeux, seulement pour le coeur et l'âme.
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Ceci me paraît être l'essentiel, le point central de cette réflexion. À l'intérieur de cet exposé, je me suis davantage penchée sur la compréhension du phénomène, en l'approfondissant sous différents points de vue, dans plusieurs dimensions. Maintenant, à la lumière des découvertes qui furent faites, il importe que se poursuive la recherche en ce domaine et en ce sens, afin d'élaborer des pistes d'intervention et d'accompagnement de la personne mourante et de ses proches, et, d'une façon particulière, de la personne malade en soins palliatifs et sa famille.
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Dans cette démarche d'approfondissement consacrée à l'accompagnement comme moyen d'intervention auprès de la personne au terme de sa vie et sa famille, il serait à propos de s'attarder à l'importance du cheminement personnel et de la maturité intérieure qui sont nécessaires chez les intervenant(e)s ou professionnel/les oeuvrant auprès des personnes malades en soins palliatifs et de leur famille, qu'ils soient professionnels de la santé, médecins, infirmières, thérapeutes, psychologues, travailleurs sociaux, bénévoles ou simplement des personnes proches d'eux. Subséquemment, l'on pourrait discerner puis mettre en lumière le rôle de thérapeute (particulièrement celui du psychologue) auprès des personnes malades en phase terminale et de leur famille. Par exemple, de favoriser ce rapprochement en aidant les proches de la personne malade à assumer la signification qu'ils ont aux yeux de cette personne. Ainsi, en partant de ce qui se fait déjà, aller plus loin dans notre réflexion et notre recherche afin de découvrir et mieux discerner l'apport du thérapeute (psychologue) pour favoriser une ouverture entre la personne mourante (encore vivante!) et ses proches. Une approche pourrait alors être élaborée selon le cheminement présenté dans cette réflexion, à l'intérieur de cette perspective qui a été développée.
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En effet, la nature et la portée de cet ouvrage ont d'importantes implications en psychologie clinique. Le fait de tenir compte de l'importance de l'attachement dans le processus de détachement que vivent la personne malade en phase terminale et ses proches a pour but de favoriser un rapprochement entre celle-ci et sa famille, afin que soit réalisée en chacun des membres la constituant, une meilleure intégration de cette épreuve pouvant être transformée en expérience de croissance. C’est d’ailleurs ainsi qu’une expérience aussi éprouvante que celle de la perte d’une personne que l’on aime peut devenir un tremplin de Vie pour soi et pour l’autre.
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Ainsi, pas à pas, tout au long de cet exposé, je me suis approchée de la souffrance, du sens dont elle peut être porteuse et qu'il nous est possible de découvrir à travers l'amour reçu et offert, à condition qu’on l’accueille. Amour qui demeure pour toujours dans le coeur de ceux et celles qui le partagèrent. Oui, nous pouvons transformer cette expérience, même de souffrance, en expérience de croissance, lorsque celle-ci est partagée dans une relation d'attachement. Elle devient alors porteuse et génératrice de découverte, d'une richesse intérieure, et nous conduit ainsi non pas à la résignation (en tirer son parti ou se conformer, baisser les bras) mais à une acceptation, impliquant un sentiment de paix profonde lorsqu'il y eut intégration et approfondissement, dans l'intériorité. Lorsque l'on découvre un sens. Celui-ci est souvent relié à la transcendance. Il nous imprègne alors d'une profonde sérénité en ayant le sentiment de vivre, de participer à un projet qui nous dépasse. C'est alors que l'on entre un peu plus dans la profondeur du mystère qui se produit lorsque la mort côtoie la vie et que la mort devient Vie en soi...
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Que nous soyons intervenant(e)s, professionnel(le)s, bénévoles, membres de la famille, ami(e)s intimes, nous sommes tous concerné(e)s. Ces personnes atteintes d'une maladie léthale, malades, en soins palliatifs, en phase terminale, à qui il ne reste que peu de temps à vivre, nous invitent à un dépassement. Un dépassement au niveau de l'amour.
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Quel est le message que vient nous dire l’être malade, mourant?
N'est-il pas celui nous invitant à ne pas avoir peur de s'attacher à lui?
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« N'ayez pas peur de vous attacher à moi qui vais mourir »
« Aimez-moi, même si je vais mourir »
et,
finalement,
« Aimez-moi qui vais mourir...
Car je suis encore Vivant/e, même dans mon mourir!»
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